Moto3 : Alexis Masbou contraint de jeter l’éponge en GP

Vendredi 5 août, le team RTG qui fait rouler les Mahindra/Peugeot en championnat du monde a appelé Alexis pour lui signifier qu’il le licenciait pour manque de résultats. Pour le Français, la pilule est amère.

Traits tirés, moral dans les chaussettes et performances en bernes : le moral d'Alexis Masbou n'était pas au top lors de son dernier GP disputé au Sachsenring. Crédit Gold&Goose.

Traits tirés et performances en bernes : le moral d’Alexis Masbou n’était pas au top lors de son dernier GP disputé au Sachsenring. Crédit Gold&Goose.

J’ai passé dix ans en GP, et mon objectif était de devenir champion du monde. Me dire que que je n’atteindrai pas cet objectif est dur à vivre » déclare lundi 8 août Alexis Masbou à Moto Journal. « En même temps, dès la fin de l’année dernière, les problèmes se sont accumulés au sein du team RTG (Racing Team Germany). La venue du sponsor Peugeot n’a pas aidé à les régler. On est donc parti sur des bases délicates. Dès le GP de France, le team a failli arrêter pour des problèmes financiers, mais ils ont finalement trouvé un repreneur. Le transporteur routier allemand Ingo Prüstel, qui a racheté le team, et dont le fils va manager la structure. Ca s’est fait juste avant le Sachsenring, et ensuite, ils ont voulu tout remettre à plat. Ils m’ont donc contacté vendredi et m’ont expliqué que les résultats n’étaient pas à la hauteur. Je serai donc remplacé à partir de l’Autriche par l’Espagnol Albert Arenas. C’est dur à encaisser, mais en même temps, je me suis rendu compte que je n’étais pas bien dans ce projet, et ça m’a également apporté un soulagement.

De l’extérieur, on avait l’impression que l’éviction du team-manager véreux Dirk Heifolf fin 2015 allait arranger les choses ?

En fait, jusqu’à la reprise du team par Prüstel, les propriétaires du team n’ont pas changé, et le nouveau team-manager Terrell Thien n’était qu’un pantin. Ca n’a rien réglé. 

Sur les Honda du team RTG, tu gagnes le GP d’ouverture de la saison 2015, et sur les Mahindra, tu ne marques pas un point en 9 GP. Il n’y a pas un problème avec la machine ?

Si, mais pas seulement. Je ne pense pas qu’on soit au bout de l’exploitation des performances de la moto. Quand tu vois Bagnaia qui déboite des Honda dans les bout droits au Mugello ou à Assen alors qu’il fait cinq kilos de plus que moi (62 contre 57, ndr), il y a un truc qui cloche. J’ai du déboiter un ou deux pilotes Honda du fond de grille depuis le début de la saison, mais c’est tout… 

Selon nos infos, Le team Aspar a engagé les techniciens Italiens qui ont développé la Mahindra en collaboration avec le suisse Suter, ce qui leur donnent de meilleures aptitudes pour la mise au point ?

Peut-être. Tous les moteurs étant plombés, il est impossible de les ouvrir pour les modifier. Mais avec des détails (échappements, boite à air, réglages châssis, aéro, ndr), tu peux créer un écart. Toujours est-il que techniquement, pour moi, le feeling n’était pas là. On a un peu réduit l’écart à partir d’Assen, mais je n’ai jamais eu le feeling requis. La seule personne qui nous a permis d’avancer dans le team, c’est Mark, le chef technicien anglais de mon co-équipier John Mc Phee. En championnat d’Espagne, il avait construit la Moto KRT, un hybride Honda/KTM qui marchait bien. Il a donc des bases… Ces dernières courses, je finissais toujours par adopter les réglages de John, parce que c’est ce qui marchait le mieux pour moi. Quand tu en es là, ça veut dire que tu es perdu, et ça me mettait en porte à faux avec mon équipe technique. Ce n’est pas la première fois que j’avais affaire à une moto pas suffisamment performante, et j’étais prêt à poursuivre jusqu’à la fin de la saison, mais ça s’arrête là. 

Et maintenant ?

J’ai décidé de prendre quelque jours de vacances pour digérer la déception et faire le point. Avant de déterminer la suite à donner à ma carrière, comme pilote ou non.

Tu as toujours ton école ?

Oui, Il me reste une date pour un stage de pilotage le 3 octobre à Albi.

Mais un mec de 29 ans avec 4 podiums en GP dont deux victoires, une pole et un record du tour, ça peut intéresser un team de Supersport ou d’endurance, non ?

Effectivement, et j’ai autour de moi des exemples de pilotes qui au lieu de galérer et de s’endetter en GP, gagnent désormais leur vie, se font plaisir et font des résultats dans d’autres disciplines. Mais j’ai besoin d’un peu de temps pour faire le point.

OK Alexis, on te souhaite bonne chance pour faire ce deuil et trouver la bonne direction, car ce ne doit pas être évident. En tous cas, ta gouaille et ta bonne humeur vont nous manquer sur le paddock.

Merci, c’est sympa, mais je serai quand même en Autriche et à Brno en touriste car j’ai déjà pris mes billets d’avion !

Pendant cette première moitié de saison 2016, Alexis n'a jamais lâché l'affaire. Il reste un excellent pilote, il faut donc qu'il retrouve un excellent guidon ! Crédit photo Gold&Goose.

Pendant cette première moitié de saison 2016, Alexis n’a jamais lâché l’affaire. Il reste un excellent pilote, il faut donc qu’il retrouve un excellent guidon ! Crédit photo Gold&Goose.

Analyse Moto Journal

On ne gagne pas le GP de République Tchèque 2014 et le GP du Qatar 2015 par hasard. Sur une moto performante et dans un bon team, Alexis Masbou est capable de jouer devant, il l’a prouvé. Mais en GP comme dans tous les sports de haut niveau, il suffit qu’une pièce manque au puzzle pour que la machine s’enraye. Le fait que sans même une blessure, le vainqueur du GP de Brno 2014 s’y retrouve à pied deux ans plus tard ne manque pas de sel… et illustre toute la complexité de la discipline. Selon nos infos, Peugeot n’est à blâmer non plus : ils ont investi la somme rondelette de 400 000 euros pour financer l’achat des deux Mahindra du team RTG et avoir ainsi le droit de figurer sur les carénages. Ils ont donc plus qu’apporté leur pierre à l’édifice. Mais quand on est présent en qualité de sponsor et non de constructeur, on fait avec le matériel qu’on achète. Quel dommage que la firme de Sochaux ne se soit pas investie directement dans la construction d’un proto. Mais c’est comme ça, et l’on ne peut que regretter que la carrière d’Alexis Masbou en GP se termine de cette manière. Souhaitons lui de pouvoir exprimer son talent dans d’autres disciplines de la course moto.



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