MOTOGP : Nicky Hayden raconte sa nouvelle vie avec Ducati

Madonna di Campiglio. Sa station de ski chicos, ses caisses de luxe garées devant les hôtels quatre étoiles, et surtout sa présentation presse conjointe des teams Ducati et Ferrari poétiquement baptisée Wrooom !

A la base, ça fait un peu snob et kitsch, mais rapidement, le journaliste en quête d’information y trouve son intérêt. Primo, des conférences de presse y sont organisées avec les deux pilotes officiels Ducati Stoner et Hayden, ainsi que le boss du service course (et directeur de la production des motos de série) : Claudio Domenicali.

Pas d’entretien intimiste mais une grande salle de conférence façon amphi de fac, garnie d’une quarantaine de journalistes armés d’appareils de traductions et d’un caméraman. Plutôt intimidant quand on a l’habitude de cuisiner un ingénieur moteur peinard au coin d’un box lors des présentation presse, mais plus pratique pour les interviewés : ça leur évite de répéter cinquante fois la même chose.

Résultat, ce vous allez goulument dévorer ici n’est autre que la compile des questions posés par tous les journalistes -dont l’ancien pilote de GP Steve Parish, qui bosse pour la BBC, et d’autres pointures qui connaissent les Gépés sur le bout des doigts. Notez que les pilotes sont très pros et répondent de manière complète à chaque question, même si MotoGP oblige, au lieu de dire que l’épure de leur amorto est ratée, ils vont déclarer « nous avons un ou deux soucis avec train arrière de la machine. PLace au petit nouveau de chez Ducati, Nicky Hayden!

Alors Nicky, heureux d?intégrer le team officiel Ducati ?
Nicky Hayden : « La première fois que j?ai enfilé mon cuir Marlboro/Ducati avec tous les sponsors du team, j?ai ressenti une grande fierté. Je suis reconnaissant de leur part de me donner une telle opportunité, et j?ai hâte que la saison commence. Jusqu?ici, tout s?est plutôt bien déroulé, mais on sera vraiment fixé lors du premier GP. »

Qu?est ce que ça fait de se retrouver avec un autre champion du monde comme co-équipier ?
Nicky Hayden : « Depuis le début, le team se met vraiment en quatre pour que je me sente le mieux possible. Je leur ai même dit de ne pas trop se mettre la pression ! Mon chef mécano, qui depuis des années n?a travaillé qu?avec des pilotes italiens, est parti deux semaines en Angleterre pour améliorer la communication entre nous. C?est ce genre de détail qui montre la motivation de mon équipe. Casey fait de même, il est resté à Jerez avec son équipe technique pour m?aider à comprendre la moto, et je sens que tout le monde va dans le même sens. Ca permet de venir bosser avec le sourire. »

Ton style correspond-il à la Desmosedici ? 
Nicky Hayden : « Jusqu?ici, ça s?est bien passé. Bon, j?ai besoin de rouler encore plus vite avec pour être dangereux (pour les autres pilotes, hein, pas pour lui, ndr?), mais j?aime cette moto. Le moteur est très puissant, ce qui me plait, et qui est toujours utile en course. J?aime le senti du train avant, très stable, en particulier dans les courbes rapides. Jusqu?ici, je n?ai roulé qu?à Jerez et Valencia, deux circuits sinueux, et je pense que ça sera encore mieux sur des pistes comme Sepang où l?on peut mettre plus de gaz. Je ne vais pas vous dire que la GP9 est une moto facile à piloter et douce. Quand tu montes sur un tel engin, tu as intérêt à être prêt car les choses se passent vite ! En sortie de courbe, il arrive que ce soit un peu chaud. Le moteur réclame beaucoup d?attention et le châssis est très rigide, ce qui donne un bon retour d?information au guidon. »

Que penses-tu du retrait de Kawasaki ?
Nicky Hayden : « Je trouve que c?est vraiment dommage. Plus il y a de motos, meilleures sont les courses, et la grille va faire un peu vide. De plus, les membres de l?équipe Kawa ont des familles, et ça ne doit pas être simple pour eux de se retrouver au chômage. La crise est mondiale, mais nous, grâce à Ducati et à nos sponsors, on est pour l?instant à l?abri. On a donc un sacré bol ! Mais dans la vie comme dans la course, rien n?est acquis et il faut se battre. C?est dans la difficulté que les gens se révèlent, et c?est bon de voir actuellement les décideurs du MotoGP essayer de modifier le règlement pour faire avancer les choses. »

Quelle différence entre les contrôles de traction Honda et Ducati ?
Nicky Hayden : « La plus grande différence entre ces deux MotoGP est l?électronique. Mais les gens ont une conception totalement erronée du contrôle de traction. C?est juste un outil, ça n?a rien de magique. Ce n?est pas parce qu?il est activé que tu ne peux pas te faire un high-side (se faire éjecter de la moto à l?accélération, ndr). Pour l?instant, on bosse encore sur mes réglages de base avec la Ducati, on n?en est pas à chercher les derniers dixièmes, là où le contrôle de traction entre en jeu. Néanmoins, la plus grande différence avec Honda est que Ducati l?utilise aussi pour faciliter le travail des suspensions, ce qu?on n?a jamais fait avec Honda. La difficulté est qu?avec l?électronique, la limite d?adhérence est plus difficile à percevoir, et qu?il va me falloir beaucoup rouler pour la sentir, alors que nous aurons moins d?essais que l?an dernier.

Stoner comme coéquipier, ça doit être plus sympa qu?être en face de Pedrosa ?
Nicky Hayden : « On s?est toujours bien entendu avec Casey. On a des origines assez similaires : on vient tous deux de championnats extérieurs à l?Europe (pas tout à fait exact car les parents de Stoner on quitté l?Australie pour l?Angleterre alors qu?il n?avait que 13 ans pour lui permettre de débuter en vitesse, la limite Australienne étant à l?époque de 16 ans, ndr). On a tous les deux pratiqué le dirt track, et en piste, nous sommes des battants. Bien sûr, on veut chacun devancer l?autre, mais on fonctionne de la même manière, et on est aussi capable de bosser dans le même sens en s?échangeant nos informations pour faire un team plus fort. »

Lorsque tu es arrivé en MotoGP, tu as été le coéquipier de Valentino Rossi. Quelles différences avec Stoner ?
Nicky Hayden : « Les champions du monde sont tous les mêmes (Hayden sait de quoi il parle, il fut champion MotoGP en 2006, ndr), leur détermination et leur volonté se lit dans le regard. Même si Rossi donnait souvent l?impression d?être en vacances lorsqu?il circulait dans le paddock, une fois dans son box, sa motivation et son sérieux ne faisaient aucun doute. Casey est de la même trempe, il est concentré sur son objectif et extrêmement fort mentalement. On ne se retrouve pas deux années de suite en lutte pour le titre mondial par hasard. Pour moi, c?est à la fois une bonne sensation et un honneur de faire équipe avec lui, en constituant un team fait de deux champions du monde MotoGP. »

Entre Rossi, Stoner et toi, qui est le plus fort ?
Nicky Hayden : « Je me sens fort. Jusqu?ici, on ne peut pas dire que ma carrière en GP ait été une promenade de santé. Mais par rapport aux gens qui disaient lors de mes premières courses (en 2003, ndr) que je ne ferai pas long feu, je suis toujours là, avec un bon guidon et suffisamment de force mentale pour être dans ce paddock et tenir mon rang. »

A jerez, tu es allé en salle de presse pour examiner ton style de pilotage sur les photos. Que cherchais-tu à corriger ?
Nicky Hayden : « En fait, c?est une chose d?analyser l?acquisition de données, mais c?est toujours bien de se voir de l?extérieur. J?ai regardé les vidéos que Ducati tournait à Jerez et Valencia, ainsi que les photos pour confirmer des sensations que j?avais, mais dont j?ai vraiment eu la certitude en examinant mon style de pilotage. Une chose est sûre, au point de vue de l?ergonomie, la Ducati est une moto vraiment confortable, avec une bonne position de conduite et de la place, ce qui ne me procure aucune gène. Du coup, mon attitude est assez naturelle dessus. A part la position du frein arrière (relevé pour ne pas qu?il ne frotte), je n?ai demandé aucune modification sur les commandes. »

Es tu en faveur d?une réduction du nombre d?assistances électroniques ? 
Nicky Hayden : « Oui. Ces deux dernières années, l?électronique a fait de tels progrès que si ça continue à ce rythme, dans une paire d?année, ce sera ridicule. Il serait intéressant de fixer une limite. Mais c?est de la technologie, et on ne peut pas empêcher le monde d?avancer. La Dorna et les constructeurs vont avoir du pain sur la planche pour trouver un compromis qui permette de préserver l?intérêt des courses. Je ne suis pas sûr que la règle des pneumatiques monomarques favorise le spectacle. Et en fin de compte, c?est ce qui est le plus important : la bagarre, les dépassements dans le dernier tour. C?est ce que veulent les spectateurs et que le MotoGP a aujourd?hui du mal à offrir. »

Pourquoi ?
Nicky Hayden : « C?est un ensemble de choses. Le passage de 1000 à 800 cc, le niveau de pilotage qui a augmenté ces deux dernières années avec l?arrivée de nouveaux pilotes, et en particulier de Casey Stoner. Aujourd?hui, la moindre erreur, et la course est perdue. Mais j?aime autant livrer une belle bagarre en piste que vous la regarder ! »

Quelle est la différence d?ambiance entre un team Italien et un team japonais ?
Nicky Hayden : « Je ne veux rien dire de mal sur mon précédent employeur, chez qui j?ai apprécié chaque minute de mon temps, même si à la fin, j?ai eu quelques regrets (Nicky fait sans doute référence à l?attitude négative de Puig et Pedrosa, ndr). Je me bornerai donc à dire que les méthodes de travail sont différentes. Chez  Honda, les motos venaient du Japon et le team était basé en Belgique, tandis que chez Ducati, tout vient du même endroit ! On sent une passion très présente, et des gens motivés pour me faire courir dans les meilleures conditions possibles. Après, ce sera à moi de faire le boulot. »

Qu?est ce qui sera le plus dur pour toi ? S?adapter à une nouvelle moto ou à de nouveaux pneus ?
Nicky Hayden : « A une nouvelle moto, sans aucun doute. Mais la règle du manufacturier unique m?a beaucoup aidé, parce qu?aujourd?hui, on a plus que deux types de pneus (chez Bridgestone, ndr) : tendre ou médium, et ça simplifie le choix. Dès la première séance à Valencia, j?ai pu me concentrer sur l?électronique et les suspensions, tandis que lorsque j?étais pilote Michelin, on passait énormément de temps à tester des pneus dotés de différentes carcasses, qualités de gomme, taille et construction. Et pour comprendre ce matériel et être capable de choisir, il faut être à chaque fois dans des temps de course. »

Combien de temps va-t-il vous falloir avant de gagner au guidon de la Ducati ?
Nicky Hayden : « Il est un peu tôt pour faire des prédictions. Ces deux dernières années, je n?ai pas fait grand-chose pour être honnête. Mon but est de retrouver mon niveau de 2006, année où j?ai gagné des courses, et d?être capable de me battre pour le podium chaque week-end. »

Une fois les interviews bouclées, c’est la récré et on part skier avec les pilotes. Enfin c’est ce que je pensais, parce qu’en fait, Nicky Hayden n’est jamais monté sur des planches de sa vie (il a parait-il pris une première leçon le lendemain de notre départ). Quant à Casey Stoner, il skie avec sa garde rapprochée : son épouse Adriana, son préparateur physique Anthony, plus un ou deux potes, et pour les accompagner, il faut réserver.

Rendez vous donc en 2010 pour le comparo Hayden/Stoner sur un champ de bosses !

 



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1 commentaires sur cet article
  1. LOIZEAU XAVIER

    AVEC SON STYLE AGRESSIF ET LA DUCATI QUI NE L EST PAS MOINS J ESPERE QUE ça fonctionera pour NICKY VIVEMENT QUE CA RECOMMENCE.

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