Elégie panégyrique à un twiniste acharné

Il y a 9 ans et un jour, l’ami Lionel “Yoyo” Boloré perdait la vie en venant travailler au guidon de son pétochon préféré, sur le bitume hostile d’une autoroute imbécile, suite à une malencontreuse rencontre avec un camion déplorable.

ROCK N YOYO

Ce n’est pas sans une certaine émotion que nous évoquons en ce jour pluvieux la mémoire heureuse de cet être en tout point exquis, plein de défauts (entre autres, il méprisait les quatre-cylindres de taille moyenne et fabrication japonaise), mais pétri de talents divers (il te débouchait un kil de rouge avec une rare élégance). Illustrateur inspiré, infographiste rapide et sûr, twiniste inconditionnel (bien qu’il ne rechignât pas à, parfois, monothéiser un peu), manuel capable de vidanger son destrier avec une assurance qui me laissais pantois, acérée plume prompte à pondre de la prose à haute teneur en gaudriole, pétanquard exécrable d’une mauvaise foi olympiquissime, farouche libertaire (il avait d’ailleurs dressé son jack-russell Piston à grogner sitôt qu’on prononçait « Sarkozyyy ! »), kawa-raceriste doté d’un coup de guidon assez fin associé à un déhanché gracieux qui nous permettait souvent d’admirer, outre le feu arrière de sa W, une miche replète, ce fourbe cumulard était en outre un gosier expert, à la pente escarpée, surmonté d’une glotte habile à l’éructation inlassable de plaisanteries féroces et de barytonneries chansonnières, que ce soit arborant un fier kilt au sein de l’Echo Raleur ou dans le plus stricte intimité du devant l’âtre athésien de son modeste manoir essonnien, quand, à l’issue d’une franche ripaille, on s’attaquait au répertoire de Tonton Georges, dont il avait attaqué l’ascension guitaristique par la face nord avec votre humble serviteur en guise de sherpa gratouilleux.

Surtout, il était féru de phrases un poil longuettes aux épithètes abondantes…

Iggy Nichön, le mickey emblématique et râleur de not’Yoyo…

Bref, sous son cuir râpeux, sous sa couenne têtue de natif de Gourin (Morbihan,« contraction, disait-il, de goret et de bourrin ») et derrière un talent certain pour le rouspétage (de plomb) conjoint au mot-pour-pourrir affûté par de longues zannées passées à la maquette de Moto Journal, derrière cette façade, cette cuirasse, dirais-je, se cachait, en vérité, un coeur tendre prompt à s’émouvoir à la vue d’une jeune fille accorte en tenue légère, à l’ouïe d’un si bémol issu d’une guitare en bois creux ou au fumet d’un plantureux pot-au-feu cerné de verres pleins et d’amis chaleureux. Un mec qui savait vivre, enfin, et qui nous a tous bien déçus par la facilité stupide avec laquelle il a passé l’arme à gauche…

Il nous manque.

laliberteguidantlepeuple

Sainte-Gamelle lance l’ouverture de la chasse aux motards (la salooooooooooooooope !)



Ailleurs sur le web
7 commentaires sur cet article
  1. Stéphane

    Merci à Frédéric pour ce bel hommage à « notre « Yoyo.
    Neuf années déjà, tristesse …

    Répondre
  2. Bien dit Fred.

    Répondre
  3. Bravo Fred pour ce si joli texte tellement vrai, à la mémoire de mon témoin de mariage, mais aussi de mon meilleur ami !!!

    Répondre
  4. Le prof Turbled

    Cent ans après, il manquait encore…

    Bravo Maestro!

    Répondre
  5. Mékilékon

    Je me souviens qu’il « ne nageait pas vite mais par contre qu’il courait trés bien au fond de la piscine ».
    Une de ses citations vue dans un vieux MJ.
    Il devrait bien s’entendre avec Fred Tran Duc la haut…

    Répondre
  6. l'Jean-Lou

    Mon cher Fred… tu me fais monter les larmes aux yeux…
    Quel délicieux portrait tu nous livres là de notre « Yoyo » bien aimé !
    Merci, MERCI… MERCI mille fois !
    Il y a tout juste une année (MJ n°2141 du 9 avril 2015), j’avais eu le plaisir d’être publié, suite à un petit courrier (« Elégie à Yoyo ») que j’avais envoyé à l’occasion du 8ème anniv’ de sa disparition.
    Mais non, « Yoyo » n’est pas mort !
    Il est toujours là, vibrant et éructant… dans nos coeurs !
    Et, depuis presque autant d’années, sa mascotte (Iggy Nichön) m’accompagne en permanence sur le pare-brise de « MaXie Nova », ma fidèle « R 1150 GS » !
    Longue « Vie » à Yoyo, là-haut, au coeur du paradis des motards heureux et longue Vie aussi… à toute l’équipe de… MOTO-JOURNAL !
    l’Jean-Lou… un fidèle depuis… plus de 40 années ! 😉

    Répondre
  7. Marco Dollars

    9 ans, c’est fou, même c’est banal de dire ça. Bel hommage, rien à rajouter. Bravo, quel talent 😉

    Répondre
Écrire un commentaire